LA MÉTAMORPHOSE DE LA CHAPELLE DE

MARLIOZ

J’ai beaucoup regretté d’avoir omis de consacrer un peu de mon temps pour découvrir l’histoire de cette chapelle située dans la magnifique forêt de Marlioz car j’aurai pu faire de belles découvertes avant sa réhabilitation.

La chapelle abandonnée avant sa réhabilitation

(photo source Internet isabeille74.canalblog.com)

La chapelle

Eglise et presbytère

Extrait du plan cadastral du 8 avril 1907

(source Archives Départementales de la Haute-Savoie, côte 3P3/5746 feuille n° 1)


Avant d’arriver à la chapelle, vous passez devant le château et l’église


(photos MT Buda 30 décembre 2018)


Cette belle forêt de Marlioz de 22,5 ha, située au nord-est du chef-lieu, est l’une des dernières chênaies d’un seul tenant de cette surface dans le département. Afin de la protéger, la municipalité de Marlioz a acquis en 2007 cette surface reconnue comme espace remarquable. Elle est ainsi classée comme espace naturel sensible (source site Internet de la commune de Marlioz). C’est une grande fierté pour les habitants de pouvoir conserver ce patrimoine naturel pour les générations futures.


La forêt de Marlioz en automne

(photos Louis Buda 6 novembre 2012)



C’est lors de l’inauguration du 20 octobre 2012 que j’ai eu l’occasion de visiter cette chapelle et j’ai été immédiatement émerveillée par l’ampleur des travaux de rénovation qui ont dû être réalisés pour mener à bien cette tâche.


Voici une série de photos de l’état de la chapelle avant les travaux. Ces vues non datées sont extraites du panneau d’information installé lors de l’inauguration.

Au printemps 2010, les abords de la chapelle sont débroussaillés par des bénévoles de la commune.

Le projet de restauration débute durant l’été 2010 avec l’aide de l’association Jeunesse et Reconstruction « qui mobilise des jeunes volontaires encadrés par des animateurs techniques et pédagogiques ». Cette association (loi 1901) créée en 1948 est agréée par le Secrétariat d’Etat à la Jeunesse et aux Sports, le Ministère du Travail et le Ministère chargé du Tourisme (source volontariat.org).


Article du Dauphiné Libéré du 12 août 2010

(source Internet)


C’est également cette association qui a participé l’année suivante à la restauration du four à pain de la commune installé à proximité de la chapelle.


Le four à pain

(photo MT Buda 30 décembre 2018)



Durant l’été 2011, une entreprise locale réalise les travaux de charpente et de couverture. Le résultat est magnifique pour qui sait apprécier la qualité d’un ouvrage.


(photos MT Buda 20 octobre 2012)


(photo MT Buda 30 décembre 2018)

En 2012, les travaux se poursuivent avec la pose des menuiseries (porte et fenêtres) ainsi que d’un nouveau revêtement de sol (dallage).


(photos MT Buda 30 décembre 2018)


Cette chapelle cache dans ses murs une histoire que j’aimerais partager. Elle est, en effet, associée à la présence autrefois d’un hôpital à Marlioz.

C’est en 1453, le 27 mai, que Jaquemet de Sambaville achète une maison à Marlioz pour fonder un hôpital afin d’accueillir les pèlerins. Il place cet hôpital sous le patronage de Saint-Jacques le Majeur dont le tombeau est vénéré en Galice et de Saint-Antoine l’Hermite qui guérit les malades (dans la même abbaye) des maladies contagieuses.

Texte extrait de l’ouvrage Mémoires et documents par la société d’Histoire et d’Archéologie de Genève, tome III, pages 270 et 271, source bookgoogle.fr)

Saint-Jacques le Majeur

 sculpture en bois datée de 1523 dans l’église de Kaysersberg en Alsace





(photos source lieuxsacres.canalblog.com)


Saint-Antoine l’Hermite

Sculpture en bois de la fin du 15ème siècle



Jaquemet est le fils de Vautier et il est né à Marlioz.


Texte extrait de la page 349 de l’ouvrage Mémoires et documents publiés par la société d’Histoire et d’Archéologie de Genève, tome 3 (source bookgoogle.fr)


Il est conseiller de la ville de Genève en 1425 puis syndic en 1428, 1434,1445 et 1455.


Texte extrait de la page 270 de l’ouvrage Mémoires et documents par la société d’Histoire et d’Archéologie de Genève, tome 3 (source bookgoogle.fr)


Pourquoi le choix de Marlioz ?

D’une part, Jaquemet de Sambaville est né dans ce village et d’autre part, Marlioz se situe sur une ancienne voie romaine de Genève en Savoie.


Information extraite de la page XXIX de l’ouvrage Mémoires et documents publiés par la société Savoisienne d’Histoire et d’Archéologie, tome LXIV (source gallica.bnf.fr)


Carte extraite de la page 149 de l’ouvrage Mémoire sur les voies romaines de la Savoie par Claude-Antoine Ducis édité en 1861 (source gallica.bnf.fr)


L’année suivante en 1454, Jaquemet de Sambaville fonde dans son hôpital une chapelle dédiée aux mêmes saints.

Il donne l’administration de l’hôpital au curé de Marlioz et aux syndics, le recteur de la chapelle devant habiter dans l’hôpital. Le premier recteur est François Binand né à Contamine et prêtre du diocèse de Genève.

(photo MT Buda 30 décembre 2018)


Extrait de la page 276 de l’ouvrage Mémoires et Documents par la Société d’Histoire et d’Archéologie de Genève, tome III édité en 1844 (source bookgoogle.fr)


Un inventaire de l’hôpital est ainsi dressé et une première hospitalière est nommée le 6 décembre 1454. Il s’agit d’une habitante de Marlioz, Catherine Beneytaz.


Ouvrage Mémoires et documents par la Société d’Histoire et d’Archéologie de Genève, tome III, pages 270, 271 et 274, source bookgoogle.fr).


Il semblerait toutefois que les dispositions initialement prévues concernant la direction de l’hôpital n’aient pas été appliquées. En effet, il apparaît dès 1473 que l’administration de l’hôpital est confiée au Conseil de Genève et aux procureurs de la Boîte de Toutes-Ames héritière de Jaquemet de Sambaville (source Registre du Conseil tome I page 182).


Ouvrage Mémoires et documents par la Société d’Histoire et d’Archéologie de Genève, tome III, page 362  (source bookgoogle.fr)

Ouvrage Mémoires et documents par la Société d’Histoire et d’Archéologie de Genève, tome III, page s 348 et 349 (source bookgoogle.fr)


La Boîte de Toutes-Ames est une institution qui avait notamment pour but de secourir les pauvres, de régler la bienfaisance publique et de diriger les hôpitaux. Elle interviendra à plusieurs reprises afin d’aider l’hôpital suite aux requêtes présentées par les recteurs successifs.

Extrait de la page 510 des Registres du Conseil de Genève à l’époque de Calvin, tome 3 (source gallica.bnf.fr)

A partir de 1539, la réforme touche Genève et elle aboutit à une scission entre l’église catholique romaine et les églises protestantes (source Wikipédia). Les pèlerinages sont interdits, l’hôpital et la chapelle tombent dans l’oubli et disparaissent peu à peu.






Dans l’Ouvrage Visites Pastorales du diocèse de Genève-Annecy, il est néanmoins possible grâce aux rapports sur ces visites de retrouver une trace de la chapelle.


Dans l’Ouvrage Visites Pastorales du diocèse de Genève-Annecy, il est possible grâce aux rapports sur ces visites de retrouver une trace de la chapelle.



Dates des visites pastorales pour Marlioz

Ouvrage Visites Pastorales du diocèse de Genève-Annecy 1411-1920, pages 196 et 408-409

(source Gallica-bnf.fr)


Si la chapelle en ruine a pu être sauvée, plus rien ne subsiste de l’Hôpital. C’est donc en 2012 que va renaître la chapelle de Marlioz et le 20 octobre se déroule l’inauguration tant attendue de ce bâtiment restauré.



(photos MT Buda 20 octobre 2012)


Par la suite, le 25 juillet 2015, deux statues représentant Saint Jacques et Saint Antoine, réalisées par le sculpteur Fernand Terrier, sont installées dans les deux niches restées vides sur l’entrée de la chapelle.


Saint-Jacques

Saint-Antoine

Photos MT Buda 30 décembre 2018

Et voici enfin les photos de la chapelle rénovée

datées du 30 décembre 2018

Entrée de la chapelle

Paroi à droite de l’entrée

Paroi à gauche de l’entrée

Paroi  en face de l’entrée

Il reste sûrement quelques vestiges de l’ancien hôpital enfouis dans la belle forêt de Marlioz. Mais cela demeurera un mystère et ce secret va continuer à traverser les âges.


Photos MT Buda

La forêt de

Marlioz

J’ai été cependant interpellée par une anomalie dans mes recherches. En effet, je n’ai trouvé aucune trace de la chapelle sur la mappe sarde dressée entre 1728 et 1738. J’ai bien localisé le château, l’église et le presbytère mais rien sur la chapelle. Je ne m’explique pas cette situation.